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Stress professionnel et infarctus du myocarde


Paris, France – A l’occasion des Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie, le Pr Sylvia Consoli (psychiatre, HEGP, Paris) a détaillé les preuves en faveur du lien, désormais admis, entre le stress professionnel et les événements cardiovasculaires, en particulier coronariens [1]. Le même type de lien semble exister pour un concept proche du stress professionnel, à savoir l’épuisement professionnel ou burn-out ou bien encore pour le harcèlement au travail. Dans le cas du burn-out, une étude (Toker S et al. Psychosom Med 2012) a ainsi montré un risque multiplié par 1,41 d’événements coronariens chez des employés israéliens. Dans le cas du harcèlement au travail, les données du National Health Interview Survey de 2010 indiquent un risque multiplié par 4,14 d’angine de poitrine chez les femmes. Pour le stress professionnel, le lien avec le risque d’infarctus du myocarde apparaît dans les études transversales comme prospectives. Une revue des étusdes prospectives conduites sur le sujet parue en 2012 montre que le stress professionnel prédit les événements cardiovasculaires dans 13 cohortes sur 20.

La plupart des résultats significatifs ressortent cependant des cohortes exclusivement masculines ou des sous-groupes d’hommes. Et sont moins nets au-delà de 55 ans.

A chaque genre son stress

Il faut noter que le modèle de stress professionnel employé n’est pas étranger aux différences de résultats observées.

Ces résultats montrent que le cœur des femmes n'est peut-être pas moins sensible au stress mais à des stress différents.

Ainsi toutes les études (3/3) utilisant le modèle de Siegrist (déséquilibre entre les efforts déployés et les récompenses obtenues) retrouvent un lien entre stress professionnel et événements cardiovasculaires contre seulement 7/13 de celles utilisant le modèle de Karasek (association entre fortes contraintes et faible marge décisionnelle) et 3/6 de celles qui utilisent d’autres modèles. Les modèles de Karasek et Siegrist, malgré des recouvrements entre concepts, n’appréhendent pas le stress de la même manière. « Ils sont complémentaires », a expliqué le Pr Consoli. Résultat, « croiser les deux donne des résultats plus pertinents » et met davantage en lumière la complexité de l’interaction entre le stress professionnel et le sexe sur le risque cardiovasculaire.

Dans l’étude suédoise SHEEP parue en 2002, qui combine les deux modèles, on voit par exemple que les efforts extrinsèques, selon le modèle de Siegriest, n’ont pas d’impact sur le risque d’infarctus de la femme mais qu’ils en ont chez l’homme, alors qu’inversement le surinvestissement (implication excessive dans son travail pour des raisons personnelles ou intrinsèques) hausse le risque de la femme et pas celui de l’homme. Ces résultats montrent que le cœur des femmes n’est peut-être pas moins sensible au stress mais à des stress différents. Les hommes seraient plus exclusivement dépendants des sources de stress professionnelles, de la pression de réalisation/réussite au travers de leur travail, avait déjà souligné J. Siegriest en commentaire de la Nurses Health Study, qui, en 2002, ne retrouvait pas de lien entre le stress professionnel et le risque coronaire chez ces femmes exerçant la profession d’infirmières. Les femmes, elles, se retrouvent plus souvent dans une situation de conflits ou de superposition de rôles (professionnel/domestique). La Stockholm Female Coronary Risk Study avait d’ailleurs montré que le risque d’événements coronariens était plus significativement lié au stress marital qu’au stress professionnel chez les femmes. D’autres facteurs pourraient expliquer les différences hommes/femmes vis-à-vis de l’impact du stress professionnel sur la santé cardiaque, comme la survenue plus tardive, en moyenne, de la maladie coronaire chez les femmes, la fréquence plus élevée des emplois à temps partiel chez les femmes ou encore la valeur protectrice du soutien social sans doute également plus opérante dans cette population, a souligné le Pr Consoli.

Quant à l’interaction avec l’âge, elle pourrait s’expliquer par le fait qu’à un âge plus avancé, le rôle de facteurs de risque autres que psychosociaux est prépondérant, note le Pr Consoli. Il est aussi possible qu’une sélection des « travailleurs résistants au stress » s’opère avec les années. Cet effet du stress sur le cœur ne passerait pas uniquement, comme cela a pu être proposé, par une moins bonne hygiène de vie.

Les femmes, elles, se retrouvent plus souvent dans une situation de conflits ou de superposition de rôles (professionnel / domestique).

Une méta-analyse (Kivimaki et al. 2012) montre ainsi que l’ajustement sur le score de risque de Framingham ne modifie pas le risque. Dans la Whitehall II Study de Kivimaki parue en 2011, qui évaluait l’impact du stress avec le modèle de Karasek, les fonctionnaires londoniens stressés étaient deux fois plus à risque d’infarctus (fatal ou non) que leurs homologues non stressés, avec ou sans ajustement. « Une médiation ou une interaction est possible, entre autres, avec la réponse inflammatoire », a expliqué le Pr Consoli. La solution est-elle d’éviter les sources de stress ? Non, estime le Pr Consoli. Les personnalités stressées sont plus à risque d’infarctus mais ont plus de chance de survie une fois passé l’infarctus… « Les gens stressés ont parfois besoin de stress, sans quoi leur vie leur paraît insipide. Il ne faut donc sans doute pas supprimer le stress chez eux mais les aider à faire le tri, à mieux gérer ce stress ».

Source Medscape

Référence : Consoli S. Stress professionnel et infarctus du myocarde. Séance à thème Stress et Coeur 9h-10h30, JESFC 2015


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